Si nombreuses sont les DSI françaises qui ont démarré un projet cloud, plus rares sont celles qui ont choisi d’en faire un véritable levier stratégique. La plupart des organisations avance pas à pas, sans transformer réellement, se privant alors des véritables bénéfices du cloud. Pourtant, des DSI audacieuses ont franchi le cap et mené à bien des projets d’envergure pour transformer radicalement leurs pratiques et leur proposition de valeur.

Le plus gros risque avec le cloud ? Ne pas en prendre !

La révolution digitale bat son plein, avec, comme activateur principal, le cloud sous toutes ses formes. Ces projets sont l’opportunité pour les DSI de retrouver leur légitimité au sein des entreprises et de reconsidérer la valeur ajoutée produite. Il parait évident en 2018, que sans recours au cloud, il deviendra particulièrement épineux de répondre aux enjeux de l’innovation digitale et du Time-to-Market. Opter pour un cloud "cosmétique", miser sur un "vrai-faux" cloud privé ou saupoudrer de l’agilité sont des stratégies dangereuses qui ouvrent la boîte de Pandore aux concurrents plus agiles et aux débordements internes, dont le shadow IT ne serait que la face émergée.

On distingue aujourd’hui des DSI de grands groupes français qui ont choisi d’afficher une réelle ambition et d’agir avec audace, en osant miser sur le cloud de façon radicale. Quelles leçons pouvons-nous tirer de leurs succès ?

Leçon n°1 : Ré-enchanter les utilisateurs

Les métiers sont avant tout des utilisateurs et, à ce titre, la transformation digitale débute et se termine avec eux. Les DSI, qui se sont transformées avec succès, ont toutes commencé par reconquérir le cœur de leurs utilisateurs. Air Liquide, dès 2014, et plus récemment Veolia et Airbus, ont basculé massivement sur G Suite ou Office 365 et déployé des postes de travail collaboratifs dits full web. Mais ces premiers changements ne sont pas seulement tactiques, ils induisent une réduction des coûts directs et indirects et ont permis de créer de la valeur et d’alimenter le cercle vertueux de la DSI. Le service desk, ainsi libéré des demandes liées au legacy, s’est recentré, avec succès, sur le service délivré aux utilisateurs et l’accompagnement dans l’adoption de nouveaux usages et pratiques.

Leçon n°2 : Clore le débat sur la sécurité dans le cloud

L’ennemi n°1 des projets cloud demeure les craintes de sécurité des données et de conformité (dont la RGPD). Une bascule rapide et volontaire permet de clore ce débat en démontrant que le cloud, y compris public, répond, la plupart du temps, aux exigences de compliance et de sécurité. Ces, transformations ouvrent la voie à la cloudification des datacenters, avec, à la clé, une nouvelle politique de sécurité cloud ready. Cette approche qui tire parti des atouts du cloud et de l’automatisation, se révèle plus efficace que la gestion d’un legacy qui n’aurait pas été conçu pour répondre à ces enjeux. Avec le cloud, la DSI évolue vers des paradigmes modernes de security by design ou DevSecOps, où chaque intervenant devient pleinement responsable de la sécurité.

Leçon n°3 : Brandir l’étendard du cloud

Une fois les utilisateurs convaincus et les équipes compliance rassurées, la DSI doit à présent inspirer et être inspirée. Pour cela, elle doit s’appuyer sur un leadership transgressif et l’affirmation d’une stratégie radicale, volontariste et lisible par tous. "De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace", disait Danton. C’est l’option choisie par le DSI de Veolia au travers d’un message simple : "ZeroDataCenter en 2018 !". Les grands projets exemplaires de transformation radicale trouvent plus souvent leur inspiration dans des histoires de meneurs d’Hommes que dans des plans d’actions à 3 ans…

Leçon n°4 : Mobiliser les équipes

Souvent laissées pour compte au profit des nouveaux métiers du cloud (architectes, rêveurs, développeurs cloud), les équipes historiques de la DSI ne doivent pas être considérées comme des "dinosaures", réduits à faire tourner l’existant. L’enjeu de la transformation passe également par l’intégration de nouveaux savoir-faire mais aussi par le ralliement de tous les talents de la DSI. Accompagnées et challengées, ces équipes peuvent ainsi développer de nouvelles compétences et réussir dans ce nouveau monde. Il y a toujours de la noblesse à prendre soin des Hommes…

Leçon n°5 : Oser faire confiance à ses fournisseurs

La force de ces DSI ambitieuses a été de miser sur une stratégie de sourcing dynamisée, seul moyen de s’entourer et de co-créer des écosystèmes agiles et à valeur ajoutée, où les prestataires complètent, prolongent et augmentent le savoir-faire interne. Elles ont pris soin de manager et de challenger leurs prestataires, d’instaurer un climat de confiance autour d’enjeux clairs et ambitieux et d’adopter des delivery model mutuellement bénéfiques.

Leçon n°6 : Impossible n’est pas français !

Classiquement, l’adoption du cloud commence prudemment sur des périmètres non stratégiques. Pourtant, les entreprises Veolia et Sanofi ont choisi de basculer SAP dans le cloud dès le début de leur projet. Les équipes ont pris le risque de placer les périmètres les plus critiques dans le cloud afin d’en démontrer la faisabilité. Cette première victoire garantit la réussite de l’ensemble du programme et présente un intérêt à la fois business et technique. Les applications critiques, cœur et artères du SI, doivent être rapidement digital ready pour oxygéner tout le système d’information et favoriser une bonne circulation des données tout en accélérant les initiatives digitales.

Leçon n°7 : En finir avec le "One Size Fits All"

Alors que les équipes sont mobilisées et ont engrangé de premières victoires, la bataille suivante sera celle des processus, des infrastructures et de l’operating model pour simplifier la chaîne de valeur et la réaligner aux enjeux des clients, périmètre applicatif par périmètre applicatif.

En lieu et place du traditionnel mille-feuille IT – où MOA, MOE, développeurs et exploitants cloisonnés n’échangent qu’à travers la notion de SLA -, la transformation exige des équipes plus intégrées, plus petites et totalement dédiées au service de clients identifiés.

L’enjeu n’est plus d’adopter UN cloud universel mais bien DES solutions cloud - IaaS privé, public, PaaS ou Saas –, des operating models et une stratégie de sourcing adaptée aux enjeux spécifiques de chaque grand périmètre. La responsabilisation des équipes sur un modèle "You Build it, you Run it" en est la clé de voûte et l’approche agile / DevOps permet ainsi de passer d’une DSI fonctionnant en guichet anonyme à une DSI capable de livrer rapidement et avec conviction les évolutions, solutions et innovations attendues par les utilisateurs.

Leçon n°8 : Se séparer de ses vieux meubles

Nombre de projets cloud sont en fait de simples déménagements dans le cloud (privé ou public) des infrastructures et applications. Ce qui revient finalement à emménager dans une nouvelle maison en y installant tous ses vieux meubles… Or, une fois passées en revue, nombre d’infrastructures peuvent être remplacées par des services natifs cloud, d’autres redimensionnées à la baisse. Non seulement cette approche permet à certaines DSI d’augmenter leur taux d’usage moyen de 20% sur des infrastructures dimensionnées pour leurs pics annuels à un taux d’usage de 50%, mais également d’abaisser proportionnément les coûts. Cette transformation est aussi une opportunité de maîtriser drastiquement l’investissement sur les applications "longue traine" et d’exploiter le formidable gisement d’efficience que représente l’automatisation offerte par le cloud pour le déploiement, la reconstruction des serveurs, leur maintenance ou les tâches récurrentes d’administration.

Leçon n°9 : Mettre en ordre de marche équipes, applications et données

L’une des dernières étapes consiste à réussir le couplage, faible mais efficace, entre legacy et nouvelles solutions. En termes d’infrastructures et d’équipes, ces mondes devront cohabiter et se parler. Or, le passage au cloud et aux systèmes décloisonnés assure l’interconnexion et la cohabitation des applications traditionnelles avec le monde digital et favorise l’important travail de modularisation et de plateformisation, à base d’API et de micro-services. Il limite ainsi les interdépendances entre équipes en devenant la pierre angulaire de leur agilité.

Leçon n°10 : Optimiser localement l’innovation

Le futur des organisations SI repose sur deux axes clés : leur capacité à adopter un positionnement clair sur l’innovation auprès des métiers et leur pertinence à porter un modèle opérationnel et des solutions d’infrastructure favorisant cette innovation. Le passage franc au cloud est la condition minimale pour libérer l’énergie de la DSI et le modèle vertical au travers de use cases délimités, adossés à des services cloud (public) directement employables et un modèle de sourcing adapté. L’action concrète et locale doit être privilégiée. Après les premiers succès, les plateformes et les savoir-faire pourront alors être mutualisés à nouveau.

Conclusion : Don’t move … Transform !

Parce qu’elle est devenue un impératif stratégique, la transformation cloud est un socle indispensable permettant de faire évoluer les SI cœur de production et digitaux vers des plateformes capables de traiter data et processus en temps réel.

Certes, le ZeroDataCenter apparaît encore, pour beaucoup, comme une chimère, mais face à la transformation, quel sera votre choix ? Souhaitez-vous être le dernier à fabriquer votre propre électricité ou souhaitez-vous devenir celui qui osera adopter des méthodes et des outils qui ouvrent la voie à l’innovation, à la fluidification, à la création de valeur et à une nouvelle proposition de valeur de votre DSI ?

Renaud a 20 ans d'expérience. Il a été directeur de centres de services et est spécialiste en direction de projets de sourcing, stratégie, alignement, gouvernance et diagnostic de prestations. Il y a maintenant 9 ans, il a fondé Timspirit avec Jérôme. Depuis, en plus de ses missions de consultant, il est en charge des sujets de recrutement et de communication.

Renaud BROSSE

Renaud a 20 ans d'expérience. Il a été directeur de centres de services et est spécialiste en direction de projets de sourcing, stratégie, alignement, gouvernance et diagnostic de prestations. Il a fondé Timspirit avec Jérôme. Depuis, en plus de ses missions de consultant, il est en charge des sujets de recrutement et de communication. Renaud est un passionné de surf.