Cet article sur la géopolitique interne de la transformation est la restitution d’un travail réalisé lors d’un GEP (Groupe d’Échange de Pratiques), animé par Timspirit qui a réuni des directeurs commerciaux d’ESN majeures en France, sous l’égide de l’AeSCM.

On voit apparaître de plus en plus d’appels d’offres de transformation, que ce terme soit explicite ou pas. En effet, il arrive que ces appels d’offres soient rédigés de façon classique alors que l’attendu est plus profond. Une fois le projet lancé, le client attend que le prestataire soit la pierre angulaire d’un changement d’organisation, de processus ou de marché. Pour les prestataires de service classiques, cela est nouveau en termes d’attendus et de postures. Les membres du GEP se sont interrogés sur les moyens dont ils disposent pour être cette pierre angulaire de la transformation dans un cadre limité. Comment détecter ce type de demande ? Que mettre en œuvre quand on est un « simple » prestataire pour accompagner la transformation de son client ?

1. Paradoxe de la demande, contexte de rupture et origine de la demande

Un appel d’offres n’énonce pas toujours qu’une transformation est attendue. Comme nous l’avons vu dans les précédents GEP, lire entre les lignes d’un appel d’offres reste essentiel. Quelques indices peuvent interpeller le prestataire :

  • Le paradoxe de la demande : à la lecture de l’appel d’offres, vous constatez que la problématique posée par le client est peu claire voire paradoxale. Soit elle balaie un spectre très large (technologique, organisationnel, business, etc.), soit la demande est « classique » dans un contexte de transformation (refonte de l’offre ou des systèmes, développement de nouveaux marchés, etc.).
  • La nature du demandeur : elle laisse deviner la criticité du projet. Par exemple, si la demande émane du top management ou des métiers, cela doit mettre la puce à l’oreille. Ainsi, la personne à l’origine de la demande donne des indications sur la nature de transformation de l’appel d’offres.
  • Un contexte de rupture : le client demande expressément un rôle de conseil de la part de son prestataire et spécifie la notion de rupture dans le contexte de l’appel d’offres. Il met en avant une volonté d’évolution de l’operating model, des offres de service ou de technologie.

2. Répondre avec le dispositif adéquat aux attentes de ses clients

L’ensemble des participants au GEP se sont accordés sur un point clé : un projet de transformation se réalise souvent dans la douleur … Et cela pour deux raisons majeures :

  • La perte d’efficacité des collaborateurs au début de la transformation qui implique un surcroit de charges pour un résultat pas toujours visible.
  • L’aspect anxiogène de la transformation en raison de la nature volatile et incertaine du changement.

Mais alors, comment répondre aux attentes de son client avec le bon dispositif ? Trois axes se dégagent :

  • Le prestataire se contente de délivrer le service attendu mais de façon irréprochable (il allège le travail des collaborateurs).
  • Le prestataire fait évoluer le service délivré en fonction des attentes de transformation (être plus autonome, se montrer plus agile, apporter plus de valeur, etc.)
  • Le prestataire intervient dans le pilotage de la transformation en mode « assistant » pour :
    • Inspirer son client et l’accompagner par « rayonnement », en s’efforçant de « faire les choses bien », d’appliquer les meilleures pratiques et en éclairant ses interlocuteurs avec ses propres expériences,
    • Informer, former et mettre en œuvre ensemble les nouveaux processus et pratiques pour diffuser une nouvelle culture.

3. Les 4 points d’attention pour gérer la géopolitique de la transformation

La réussite d’un projet de transformation ne se mesure pas à la seule réussite technique. Pour s’assurer du succès, le prestataire doit vérifier 4 points essentiels :

  • La cartographie des parties prenantes : comme vu dans des GEP précédents, faire un sociogramme est clé. Il permet d’identifier les acteurs, leurs rôles, leurs attendus, leur influence, leur histoire et leurs rapports de force.
  • La gestion des intérêts divergents : il est fondamental de trouver un équilibre entre les intérêts des parties prenantes et de fusionner l’intérêt global et les rapports de force.
  • L’agenda : un projet de transformation s’inscrit forcément dans un agenda qui le dépasse. Il s’agit d’identifier les frottements et d’anticiper la gestion de situations provisoires qui vont être nombreuses.
  • Des leviers pour entretenir la dynamique : cela est particulièrement vrai dans le cas où les bénéfices perçus sont lointains.

Dans tous les cas, tout passe par une communication régulière et maîtrisée afin de rappeler l’objectif du projet, les modalités de réalisation et les rôles et responsabilités de chacun dans ce changement.

4. De l’importance de la « croyance »

Le GEP a identifié un frein important au changement : des collaborateurs qui ne croient pas au projet. C’est d’autant plus critique quand ces collaborateurs sont des managers. Des études montrent que l’on peut tout de même avancer. Dans une population moyenne, il existe toujours à peu près la même proportion de collaborateurs qui vont freiner le projet que de collaborateurs moteurs. La majorité suivra en fonction de l’équilibre entre les deux groupes.

Entretenir la dynamique nécessite de prendre soin des éléments moteurs et réduire l’influence des éléments freins, voire à leur proposer de se positionner sur des projets plus en phase avec leurs envies. Entretenir la dynamique passe également par la communication martelée sous différentes formes afin d’assurer la bonne diffusion des messages. On approche presque de la « propagande ». Un objectif sain, des méthodes éthiques seules garantissent le respect de chacun.